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Nos revendications, nos propositions

Aux États généraux de la sécurité routière (Paris 17 septembre 2002), notre association était invitée à s'exprimer sur la conception des véhicules.

 

Geneviève Jurgensen

 

Madame, Messieurs les Ministres,

Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs,

 

 

Permettez-moi de vous lire quelques lignes d’un article paru le 19 août dernier, dans les pages du quotidien Le Figaro. Il s’agissait sous la plume de Jacques Chevalier de rendre compte avec toute la distance journalistique qui s’impose de la sortie du dernier modèle de Jaguar, moteur limité à 250 km/h :

 

« (…) Le R chez Jaguar signifie clairement Racing ou, si l’on préfère, sport extrême. Le dernier doute sera levé à la contemplation de cette S-Type, arc-boutée sur ses roues de 18 pouces et prête à bondir, mufle au ras du bitume. Derrière la calandre largement grillagée et peinte comme s’il s’agissait d’un missile furtif, sommeillent pas moins de 406 chevaux. Pour les faire hennir, les ingénieurs n’ont pas tergiversé. Un V8 suralimenté par un compresseur Eaton et deux refroidisseurs, et voilà l’écurie remplie de pur-sang très chauds. (…)»

 

Pour qu’il ne me soit pas reproché de prendre un exemple extrême, tant par le type de la voiture que par le délire du journaliste, je précise que le compteur de vitesse du tableau de bord de la plus modeste Peugeot 106 affiche «180 km/h», comme celui d’une Citroën Saxo, et que la Renault Clio affiche 220 km/h.

 

C’est donc la totalité du parc automobile qui est homologué POUR violer la loi.

 

Le Code de la route en effet, je le rappelle, est une loi. Qui stipule ceci :

 

Article L.311-1

« Les véhicules doivent être construits, commercialisés, exploités, utilisés, entretenus et, le cas échéant, réparés de façon a assurer la sécurité de tous les usagers de la route. » 

 

Les bilans annuels de l’insécurité routière en France ne disent pas un mot du sur-risque lié à ces capacités de vitesse, qui dépassent toutes largement la vitesse la plus élevée autorisée sur tout notre réseau routier. Comment ose-t-on constater depuis des décennies que l’insécurité routière est la première cause de mortalité de la jeunesse, qu’elle provoque chaque année d’horribles handicaps par milliers, que la France est en ce domaine la honte de l’Europe industrialisée, que la vitesse de pointe et le poids sans cesse croissant des véhicules tiennent une place de choix dans ces drames, et ne pas agir sur les causes structurelles de cette catastrophe sanitaire quotidienne ?

 

L’administration ne restera pas à l’abri du procès que conduira un jour une famille de victime, indignée qu’une industrie de masse n’ait pas été conçue pour la protéger d’un risque, la vitesse inutile et dangereuse, parfaitement documenté. Ce jour-là, bien sûr, la Ligue contre la violence routière sera au côté de cette ou de ces familles, et elle soutiendra leur action.

 

La France en effet ne peut pas accumuler la totalité des risques sans que sa population en paye le prix abominable. Elle ne peut pas homologuer les voitures sans cesse plus lourdes et plus rapides ET avoir un réseau secondaire très développé, où s’observent la majorité des accidents mortels ET pâtir d’un système de contrôles et de sanctions en jachères ET être le pays où l’on consomme le plus d’alcool par habitant ET subir les agissements d’une minorité de conducteurs pour laquelle la loi n’est là qu’à titre indicatif.

 

Qu’on ne se cache pas derrière le paravent de l’Union européenne. Un pays qui utilise les droits que lui confèrent les traités européens pour assurer la sécurité alimentaire en déclarant unilatéralement des interdictions d’importation de viande bovine et qui produit, importe et homologue des véhicules qui peuvent rouler à 250 km/h, n’a aucun souci de la sécurité routière. Ce pays n’a aucun souci de ses victimes d’hier, d’aujourd’hui et de demain.

 

La demande logique de la Ligue contre la violence routière est donc celle-ci :

-La Commission européenne et les autres instances de l’Union doivent être mises devant leurs responsabilités. La France doit les prévenir qu’elle prendra des mesures unilatérales si l’Union n’assure pas une sécurité routière structurelle par la limitation généralisée de la vitesse des véhicules à la construction. Cette vitesse ne saurait être sensiblement supérieure à 130 km/h.

 

La proposition de la Ligue contre la violence routière est la suivante :

-Plusieurs milliers de nos adhérents se proposent pour être les pionniers en France de l’utilisation de la « boîte noire ». L’État doit les y aider, afin de tester en grandeur nature les apports de la boîte noire : quels renseignements indispensables fournit-elle aux juges en cas d’accident, quel est son impact le comportement du conducteur ; quelle est sa facilité d’utilisation, comment la perfectionner, quelles conclusions naturelles les assureurs doivent en tirer ; l’objectif à court terme étant la généralisation de ce système, en commençant bien entendu par les véhicules de l’administration et des entreprises publiques, en attendant l’adoption de la boîte noire par tous les véhicules légers motorisés, y compris bien entendu les deux-roues.

 

La France déplorait, il y a seulement trente ans, deux fois plus de morts qu’aujourd’hui ; la barbarie de la violence routière peut aller très loin sans que la démocratie soit en danger, et sans qu’aucune filière économique soit menacée. C’est la grande difficulté à laquelle nous sommes confrontés, car l’État est prêt à de grands sacrifices pour lutter par exemple contre le terrorisme, et se montre plus que réactif quand il s’agit de protéger un secteur industriel. On le voit à chaque fois qu’un risque alimentaire, même mineur, même inexistant –souvenez-vous de la panique qui a suivi la rumeur concernant les boîtes de Coca-Cola soit disant contaminées– se profile.

 

L’unique raison pour laquelle nous devons réduire drastiquement l’horrible nombre des accidents de la route relève du respect de la vie et, au-delà, du respect de la loi. Il n’est aucun domaine où de si grands progrès peuvent être obtenus en consentant des sacrifices aussi modestes. Ou bien nous le faisons, comme l’a solennellement demandé le président de la République le 14 juillet, ou bien nous choisissons, seuls en Europe, de sacrifier la vie et la loi sur l’autel du libéralisme exterminateur.

 

Je vous remercie.

 


 

© 2001-2004 LCVR - Derniere modification le 16 février 2007.